Alys s´ennuie. Et quand elle s´ennuie, elle s´énerve. Et quand elle s´énerve, ça s´entend. Alors, au lieu de faire du grabuge dans sa chambre et ainsi déranger ses voisins, l´adolescente décide de sortir du centre et faire un tour dans les rues. Pourtant, lorsqu´elle pose le premier pied sur le trottoir, Alys hésite grandement. C´est la premier fois depuis son entré au centre qu´elle sort à nouveau. Dans la rue, cet endroit immonde qui lequel elle a été forcé de passer l´hiver. Un endroit vaste et libre ... mais pas tant que ça. Finalement, Alys n´a que de mauvais souvenirs de ces rues. Et ces souvenir reviennent au galop et menacent de la piétiner lorsqu´elle aperçoit, au bout de la rue, la ruelle dans laquelle elle s´est fait agressé avant que Logan ne la sauve.

Déglutissant, frissonnant, prenant une profonde inspiration, elle se met en route, prenant la direction opposée. Tendu comme un arc, tous les sens en alerte, Alys sent ses instincts revenir naturellement. Dans la rue, si t´es faible, t´as tout perdu. C´est un monde pour sois, une société impitoyable. Si pour les uns la rue est synonyme de liberté et d´indépendance, pour Alys, c´est tout autre chose. Si l´enfer était un endroit, alors ce serait les rues de San Francisco. Ces rues qui avaient, à plus d´une reprise, presque courues à sa perte.

Mais, alors qu´elle atteint le bout de la rue, des pas se firent entendre derrière. D´abord des pas de marches, puis des pas de courses. Alys sent ses muscles se tendre. Automatiquement, sa respiration s´accélère, les battements de son cœur redouble, tandis que l´adrénaline se propage dans ses veines, mettant son corps et ses muscles dans une situation bien connue: celle de se préparer à se batte ou à fuir. Et finalement, une personne apparait à ses côtés. Brusquement. Trop brusquement.

Alys fait un violent écart, se recule de trois pas puis s´immobilise et sert ses poings. C´est une femme. Les femmes sont plus faibles que les hommes. Alys saura se défendre. Sourcils froncés, les yeux lançant des éclairs, elle est prête à se battre pour sa survie. Mais l´inconnue ne lui laisse pas le temps, ni le choix. Peut-être n´avait pas remarqué la réaction d´Alys, ou peut-être avait-elle tout simplement décidé de l´ignorer. Toujours est-il, qu´elle se mit à parler. Et le ton enjoué de cette femme eu un drôle d´effet sur notre adolescente.

Les sourcils toujours froncé, elle affichait maintenant une mine surprise. Desserrant ses poings, Alys se redressa, gardant son regard fixé sur l´inconnue. Celle-ci lui avait parlé sur un ton comme on parle à un ... ami. Ou une connaissance. Or, notre canadienne ne la connaissait pas. Elle ne l´avait même jamais vu. Ce pourrait-il que cette inconnue soit une stalkeuse? Qu´elle en connaisse bien plus sur notre adolescente? Paranoïa. Ce devait être ainsi qu´on appelait ce sentiment.

"Euh ..." parvint-elle finalement à articuler, avant de refaire un demi pas vers l´arrière, mettant encore plus de distance entre elle et cette stalkeuse "qu´est-ce tu m´veux?"

Passé la surprise, son regard se fait plus dur, son ton étant froid et sec.

Cette situation devient de plus en plus bizarre. Cette stalkeuse, au lieu de l’agresser, reste sur place, accepte son besoin d’espace. Et pour couronner le tout : un sourire pare son visage. Un sourire doux et rassurant, qui s’agrandit d’avantage lorsqu’elle prend la parole. Elle s’excuse d’avoir faire peur à Alys. Ouais mais c’est un peu tard pour les excuses ! Alys n’a jamais été friand des excuses. Elle les trouve pour la plupart inutiles étant donné qu’elles ne changent pas les actes passés. Mais elle se garde bien de le dire.

Alys se tend légèrement et forme à nouveau ses poings lorsque la stalkeuse lève ses mains. Là, c’est évident, elle va attaquer. Sauf que … non. Les mains ouvertes, paumes tournées vers Alys, l’inconnue montre ainsi un signe d’innocence, de paix. Et en plus elle se présente. Elle veut s’ouvrir à Alys et l’incite à en faire de même. Suspicieuse, la jeune canadienne observe celle qui s’est présenté comme étant une certaine Micah et qui, apparemment, l’aurait vu au centre. Doit-elle la croire ? Alys à toutes les raisons de ne pas le faire.

Elle ne connait pas cette inconnue. Cette Micah l’a surprise et son sourire est peut-être un peu trop doux pour être sincère. Mais que pourrait-elle bien lui faire ? Je veux dire, à part la kidnapper et l’enfermer dans une chambre ou la vendre à des hommes ? Peut-être fait-elle partie d’un gang et que ce sourire est sa façon d’amadouer ses victimes ?

« Ta gueule » grogne Alys en tournant la tête vers la droite.

Les yeux fermés, visage crispé, poing serrés elle se maudit. Ses paroles étaient dites à l’attention de cette voix dans sa tête qui lui ordonne de fuir et qui lui donne ces pensées tellement puériles. Prenant plusieurs grandes inspirations, l’adolescente relève finalement la tête vers Micah et la fixe d’un regard dur.

« Le centre tu dis ? Qu’es-ce tu as fais là-bas ? »

C’était une question indiscrète, pour sûr. Mais pour le coup, ça lui est fortement égal. Alys a envie de savoir si oui ou non elle peut faire confiance à cette inconnue.

Qu’elle se calme ?! Non mais cette femme se prenait pour quoi pour lui dire ça, hein ? Franchement. Elle répète qu’elle est désolée. Mais elle n’a toujours pas compris que les excuses n’ont aucun effet sur Alys ?! Qu’es-ce qu’elle est naïve cette femme. Rien que sa présence est énervante. Alys est déjà à demi tourné pour repartir d’où elle, quand cette Micah reprend la parole. La jeune canadienne se fige. Cette inconnue était à la rue ? Instantanément, Alys se retourne pour lui faire face. Curieuse, elle l’observa, tête légèrement incliné sur el côté. Finalement, elles ne sont pas si différentes que ça. Micah à donc aussi emménagé dans le centre après avoir passé quelques temps dans la rue. Aussi, elle comprend finalement sa faute : elle n’aurait pas du accourir et ainsi surprendre Alys.

D’ailleurs, celle-ci souffle et, fermant les yeux, se passe une main sur le visage. Cette femme à beau être désolé, son comportement n’est pas tout à fait excusable. Mais l’adolescente décide finalement de mettre tout ça de côté. Alors, relevant le regard, elle fait un pas vers l’inconnue, restant tout de même à distance.

« C’est vrai que tu n’aurais pas dût faire ça. » dit-il sur un ton neutre, ni froid, ni sec, ni chaleureux. « Mais le passé n’est malheureusement pas changeable. » reprit-elle en se redressant légèrement « Je suis au centre depuis même une semaine, j’ai passé les 3 derniers mois dans cette rue. Je pense que tu comprends pourquoi je ne juge pas ma réaction comme était excessive. »

Alys n’est pas du genre à s’apitoyer sur son sort. Ce qu’elle a vécu est sensé être relégué au second rang, mais ce n’est pas facile. Pas facile du tout. Enfin, cette Micah n’a rien fait de mal. Et si Alys reste sur ses gardes, alors elle ne risque pas grand-chose. Déglutissant et soupirant discrètement, la canadienne relève à nouveau son regard vers l’inconnue, la fixe longuement, puis hoche une fois la tête.

« Alys. » se présente-t-elle finalement, ouvrant ainsi une de ses barrières de défense.