Well, I guess I need you

- WITH LUKE -

Même s’il pleut à verse en cette journée, Max aurait mille fois préféré trainer dehors que de rester dans cette chambre, à attendre… un homme. Il ne s’agit que de l’homme d’entretien du Centre, mais pourtant, cela l’incommode de devoir le croiser, lui parler, et tout ce qui s’en suit. Elle ne compte pas rester des heures en sa compagnie, ni même le temps qu’il effectue les réparations nécessaires, mais il faut qu’elle soit présente pour lui ouvrir la porte, et lui expliquer de quoi il retourne. La veille au soir, en revenant du repas de fêtes qu’avait organisé le Directeur, la jolie brune a eu la joie de découvrir de l’eau sur le sol de sa chambre ; son radiateur, avec l’usure, s’est mis à fuir, et a inondé une partie du parquet. Max a eu la présence d’esprit de couper l’eau, mais il fait désormais un froid de canard dans la pièce. Ce n’est pas quelque chose qui l’ennuie réellement, puisque nombreuses sont les nuits qu’elle a passées dehors, mais la jeune femme sait qu’elle doit prévenir de tout problème de maintenance, et qu’il doit être traité au plus vite. C’est une des règles du foyer et, depuis son arrivée, elle met tout ce qui est en œuvre pour les suivre avec sérieux. Ce séjour en ce lieu est, pour elle, une chance, un luxe, qu’elle ne peut pas se permettre de perdre. C’est l’opportunité ou jamais pour elle de changer de vie. Car Maxine n’envisage pas de retourner auprès de sa famille, pas après ce qu’elle a traversé. Elle a honte, elle a peur. Elle aimerait se remettre sur pieds avant de retourner auprès de ses parents. Elle voudrait qu’ils puissent être fiers d’elle, et elle sait qu’elle n’a pas de quoi les rendre fiers aujourd’hui. Alors en attendant, ce Centre, c’est tout ce qu’elle a. Et même si la venue d’un homme dans sa chambre, dans son intimité, la met mal à l’aise plus qu’autre chose, Max est décidée à respecter toutes les règles qu’on lui a imposées à son arrivée.

Vêtue d’un jean déchiré au genou gauche, de petites baskets grises en toile, et d’un large pull bleu électrique, la jolie Maxine attend la venue de l’homme d’entretien avec une certaine appréhension. Comme une boule au ventre. Les cheveux détachés, l’air nerveux, la jeune femme tente de lire un bouquin en attendant, et en se mordant frénétiquement la lèvre inférieure. C’est idiot, elle le sait, cet homme ne lui fera rien de mal, mais aujourd’hui, à part à Neal, la belle brune ne fait pas confiance à grand monde, pourvu que ce soient des hommes en tout cas.

En attendant frapper, Max a un sursaut. Elle relève la tête en direction de la porte de la pièce, et abandonne son livre sur son lit, pour se lever, la gorge nouée. En tournant la poignée, elle tente de prendre une profonde inspiration pour se détendre. Cela n’a pas le moindre petit effet, d’autant que l’imposante carrure du jeune homme qui apparaît devant elle l’impressionne énormément. Il y a bien 30 centimètres de différence entre eux. Elle détourne timidement le regard en ouvrant la porte pour le laisser passer.

Bonjour…

Murmure-t-elle, la tête baissée. Demander de l'aide au Centre, c'était déjà un pas difficile à franchir pour elle, mais c'était nécessaire. Là, c'est différent, et néanmoins, ça ne la met pas plus à l'aise. Elle passe nerveusement une main dans sa tignasse brune.

La reprise après les fêtes était assez douce vu qu'il commençait sa semaine de travail par un tour au Centre Adam Hawkes. En fait, après le réveillon en famille, il n'avait pas voulu prendre de clients sérieux pour recommencer en douceur après deux jours de fête qui l'avait bien occupé. Etant tout comme fils unique, quand les fêtes se passaient avec la famille proche, ils n'étaient guère que trois, mais cette année, une partie de sa famille maternelle - avec qui il n'avait aucun lien de sang car il s'agissait en fait de sa belle-mère - s'était jointe à eux : les grands parents, un oncle, une tante et deux de ses cousins et cousines qui étaient plus jeunes que lui de quelques années. Il y avait eu pas mal d'ambiance du coup, avec un grand père saoul, des jeunes bavards et de bonnes parties de cartes autour de discussions plus ou moins sérieuses... de toute façon il n'y avait pas eu d'enfants...

La chose qui l'avait tout de même un peu déçu, c'est qu'il n'avait pas réussi à amener Peter à la maison avec lui. Et dire qu'il l'avait retrouvé ... C'était incroyable tout de même. Il s'agissait vraiment d'un coup de bol qu'il ait su que celui-ci était son grand frère qu'il avait longtemps recherché. Quand il était parti de la maison, Luke n'était pas encore assez âgé pour se rappeler de tout, et puis la dernière fois qu'il l'avait vu, Pete n'avait que 16 ans ... et maintenant il approchait de la quarantaine, c'était inimaginable ! Mais malgré tout, malgré le temps écoulé, malgré qu'il ne le connaissait pas et que son frère était une personne très spéciale, il tenait beaucoup au fait d'apprendre à le connaître. Pourtant, Luke était un grand garçon maintenant, il n'avait pas besoin d'un grand frère avec qui jouer et qui lui expliquerait la vie, mais c'était une chose qui lui avait toujours tenu à coeur sans trop savoir pourquoi, et maintenant plus que jamais.

Mais ce n'était pas pour lui qu'il était présentement au centre. Luke ne changeait pas ses bonnes habitudes et venait ici aujourd'hui pour faire quelques travaux de manutention. A son arrivée, après les salutations, on lui avait donc transmis ce qu'il pouvait faire pour rendre la vie plus agréable aux résidents du centre. Il s'orienta donc seul vers la chambre dans laquelle il y avait apparemment un souci de radiateur qui fuit et frappa à la porte pour se faire connaître.
Une jeune femme vint lui ouvrir, une jolie brunette, du nom de Maxine d'après ce qu'on lui avait dit. Elle n'avait pas l'air de quelqu'un de très enjoué ... il ne fut même pas accueilli avec un sourire mais tout juste avec un regard, un bonjour du bout de lèvres ... Bon, fallait pas s'en faire, il avait pris son matériel avant de monter, il n'avait plus qu'à s'y mettre.

Bonjour, bonjour. Chambre 104, fuite au niveau du radiateur ? Il entra dans la pièce lorsque sa "patiente" s'effaça pour le laisser passer et jeta un cou d'oeil dans la pièce. Elle n'était pas bien grande, mais ça aurait pu être pire, du coup, il visualisa tout de suite le radiateur défectueux. Vous l'avez déjà arrêté, ça se sent. Bon réflexe. Je peux ? demanda-t-il en indiquant du regard l'objet qu'il devait réparer et ses propres outils.

Max s’était réconfortée en se disant que, l’année prochaine, avec un peu de chance, elle passerait peut-être la période des fêtes en famille. Elle ne sait évidemment pas de quoi son avenir sera fait, mais elle espère que d’ici une année, elle aura réussi à se reconstruire un minimum. Elle sait que le chemin sera long, tout spécialement pour elle, qui ne s’est pas remise du traumatisme de son viol, mais elle tient à garder espoir de voir les choses s’arranger. Tout ne sera pas réglé d’ici là, mais peut-être pourra-t-elle reprendre contact avec sa famille, ou une partie tout du moins. C’est une de ces rares choses qui la motivent, comme sa passion : l’art. Si elle n’avait pas ces choses auxquelles se raccrocher, Maxine se serait certainement laissée sombrer depuis longtemps. La solitude est pesante, mais pas insurmontable. Elle sait qu’elle a toutes les cartes en main pour s’en sortir, surtout depuis son intégration au sein du foyer.

Nerveuse, la belle brune ne manque pas de sursauter en entendant frapper à sa porte. Rares sont les résidents qui viennent lui rendre visite, et en l’occurrence, la jeune femme sait qu’il ne s’agit pas d’un ancien sans-abri comme elle. Un homme devait passer la voir pour régler ce satané problème de radiateur, cette méchante fuite. S’il avait été une femme, Max n’aurait pas éprouvé un tel embarras, mais il est rare de voir des femmes revêtir le rôle de plombier, et il faudrait donc bien qu’elle s’y fasse. C’est le plus timidement du monde, et en sentant son cœur bondir dans sa poitrine que Maxine laisse finalement ce type passer la porte de sa chambre. Il lui semble immense, imposant. Et ça ne la rassure pas. Contre lui, elle sait qu’elle ne pourrait pas grand-chose. Mais en même temps, il n’y a aucune raison qu’il cherche à lui faire du mal. Il faut qu’elle respire. Qu’elle se calme. Neal lui a dit qu’elle devrait réapprendre à faire confiance aux autres. Pourtant, elle n’a pas la force, après le passage du jeune homme, de refermer la porte derrière lui. Elle la laisse un peu entrebâillée. Au cas où. Elle se focalise ensuite sur les questions qu’il lui pose, sans parvenir à le regarder droit dans les yeux. Sa gêne est sans doute palpable.

C’est ça.

Souffle-t-elle, plutôt contente qu’il sache à quoi il a affaire, au moins il sera venu avec le matériel nécessaire aux réparations. Le jeune homme constate alors que la brune est parvenue à stopper la fuite. Maxine acquiesce nerveusement à nouveau, en passant une main dans sa longue chevelure, une fois de plus.

Oui, j’ai préféré, j’avais peur que ça empire.

Explique la jeune femme, avant d’hocher la tête, à sa nouvelle question.

Bien sûr…

Murmure-t-elle, en se décalant pour le laisser passer. Pour tout dire, Max n’attend plus qu’une chose : qu’il constate l’ampleur des dégâts et qu’il lui dise pouvoir réparer la fuite. Elle pourra alors s’éclipser, et le laisser faire son travail.

S'aventurant alors sur le territoire de la demoiselle, Luke posa sa mallette à outils et ne tarda pas à se baisser pour voir si cette fuite était visible à l'oeil nu. C'était vraiment l'impression qu'il avait : pénétrer dans un espace privé et secret ... C'était assez normal vu qu'il s'agissait déjà d'une chambre, la pièce la plus souvent cruciale dans une habitation car elle renferme des trésors cachés dans un coin et surtout beaucoup de souvenirs et d'effets personnels qui en disaient long sur la personnalité de celui qui l'habitait. Luke se disait qu'il suffisait à un psy d'entrer dans celle de son patient pour tout savoir de lui, mais bien que moins observateur qu'un enquêteur, il comprenait que cette pièce-ci était un jardin secret qui laissait entrevoir que sa propriétaire aimait l'art et la peinture. Tout du moins, dès le départ, il s'était dit que les réactions de la fameuse Max étaient peut être dues à ça ... mais apparemment pas seulement. Elle semblait si mal à l'aise qu'il n'osait même pas la regarder de peur de rajouter à son mal-être ni même jeter un autre coup d'oeil dans la pièce.

Malgré tout, il s'efforça à parler, parce que franchement, il ne savait pas si le silence était réellement une solution à l'ambiance qui régnait. Donc, tout en observant minutieusement de système du radiateur, il reprit.

Donc ... la fuite date de quand ? Vous avez une idée ? Et est ce que par hasard vous auriez vu d'où elle venait ? Vu que je ne la vois pas comme ça, va falloir que je refasse couler un peu d'eau pour m'en rendre compte, alors si vous aviez l'info ...

Luke n'avait pas le moindre doute qu'il y est réellement une fuite car de un, personne n'aurait éteint son chauffage en cette saison sans une raison valable, de deux, la charmante Maxine se serait surement passé de cette visite si elle avait pu et de trois ... la trace d'humidité à côté du radiateur ne faisait aucun doute. Mais restait le fait qu'il ne voyait pas d'où ça venait à l'oeil nu. Donc soit ça se passait à un raccordement - ce qui était difficile à voir - soit il s'agissait d'une micro fissure sur un des tuyaux. de toute façon, avant toute opération, il était évident qu'il allait falloir purger le système et qu'il allait avoir besoin de matériel.

Vous auriez une bassine sous la main ? demanda-t-il en se tournant vers elle pour la première fois depuis qu'il était rentré.

Totalement parti dans son travail, Luke ne se posait plus guère de questions, mais après tout il ne s'agissait que d'un regard...

C’est le bon terme, il s’agit bel et bien du « territoire » de Maxine, et elle ne laisse pas n’importe qui y pénétrer. C’est vraiment parce qu’elle n’a pas le choix qu’elle a accepté que le jeune homme vienne réparer la fuite du radiateur. Ça fait partie des règles du foyer, elle devait prévenir de cette défaillance, et elle devait ensuite recevoir quelqu’un pour les réparations. Clairement, ça ne l’enchante pas, mais elle est bien obligée de se plier aux règles, exactement comme tout le monde. Par réflexe, Max prend tout de même soin de ne pas fermer complètement la porte de sa chambre. Elle n’aime pas se retrouver seule avec un homme, encore moins un homme qu’elle ne connaît ni d’Eve ni d’Adam. On n’est jamais trop prudent. Ou peut-être que si, dans son cas. Sa nervosité se ressent aisément, et la petite brunette ne se sent pas très à l’aise devant un type aussi imposant. Il lui semble immense, il faut dire que la jeune femme n’a pas l’habitude de porter des talons. En baskets devant lui, on dirait bien que 30 centimètres au moins les séparent.

Enfin peu importe. La belle brune tente de se concentrer sur les mots du jeune homme, qui ne semble pas chercher à parler de la pluie et du beau temps. En effet, par chance, il se focalise sur le problème de radiateur, et Max, bien qu’intimidée, tente de lui donner les réponses à ses questions, en essayant par la même occasion de se calmer un minimum. Stresser pour si peu, c’est vraiment idiot quand on y pense.

Je l’ai remarquée hier soir, quand je suis venue me coucher après le repas de Noël. J’ai tout de suite coupé l’eau.

Explique-t-elle, d’une petite voix fluette. Elle se mord la lèvre inférieure quand il lui demande si elle a une vague idée d’où vient la fuite. Elle qui pensait s’éclipser, on dirait bien que c’est raté.

Je crois que ça venait du robinet…

Murmure-t-elle, d’un air bien moins assuré, tout en désignant le raccordement d’un signe vague de la main. Son regard croise finalement celui du jeune homme, sans doute pour la première fois, lorsqu’il se retourne pour l’interroger une fois de plus. L’intensité qu’elle a su déceler dans les yeux du jeune homme, même très brièvement, ne manque pas de la déstabiliser davantage mais, après avoir avalé avec difficulté sa salive, Max tente de se ressaisir. Elle sait maintenant qu’il a les yeux verts / noisettes.

Je dois avoir ça dans la salle de bain.

Lâche-t-elle, avant de lui tourner le dos, pour ouvrir la porte coulissante de la salle de bain, et passer à l’intérieur. Elle trouve une petite bassine sous l’évier, qu’elle attrape avec rapidité, avant de la présenter au jeune homme, de retour dans la chambre :

Est-ce que ça fera l’affaire ?...

Emmagasinant les informations qui lui étaient données, Luke commençait à vérifier le système pour prévoir la purge. Sa cliente - qui n'en était pas vraiment une - avait l'air de plus en plus mal. Elle était peut être agoraphobe à ce niveau ... mais plus il y pensait, plus il lui trouvait des réactions d'adolescente perturbée par ses hormones... C'était une blague hein ! Enfin, à moitié ... C'était mignon mais un peu lourd aussi, à cause de ça il ne savait pas trop comment réagir avec elle, essayer l'humour ou se taire ? Blablater sur un sujet plutôt qu'un autre ? Ca en devenait stressant pour lui aussi, ce qui était gênant s'il voulait bien bosser.

Maxine le laissa deux secondes et revint avec une petite bassine transparente.

Merci, ça convient parfaitement. dit-il avec un sourire aimable, avant de se tourner à nouveau vers le radiateur. En fait, même un petit récipient aurait suffit mais l'eau et jamais propre, du coup c'est mieux.

Ce qu'il pouvait dire allait pas forcément être d'un grand intérêt pour la jeune femme, mais comme certains clients aimaient bien savoir le pourquoi du comment, il savait expliquer les démarches. Vu qu'elle n'était pas à l'aise et qu'elle ne semblait pas savoir quoi faire, il préférait couvrir le silence qui régnait. C'est sûr que y'avait mieux que de parler tuyaux avec une fille mais bon ... Mais, tout en bricolant, il essaya un autre sujet de conversation.

La soirée de noël était sympa alors ? C'est pas une première les petites soirées du centre mais noël c'est toujours un peu particulier ...

Il aurait pu développer là dessus, parler du fait qu'il n'était pas venu parce qu'il passait les fêtes en famille et tout, mais c'était souvent un sujet tabou avec les résidents, pas mal d'entre eux étaient là parce qu'ils étaient partis de chez eux ou qu'ils n'acceptaient pas l'aide des leurs... Et si sa "presque-cliente" avait participé à la soirée, c'est qu'elle devait en faire partie. Et puis ce lancement de discussion était un peu un test, pour voir vite fait si elle était capable d'une discussion qui la touchait un peu avec son plombier. C'était toujours autre chose que la tuyauterie...

Maxine prend vraiment sur elle pour répondre à ses questions, et se montrer intéressée par cette histoire de radiateur. Si ça n’avait tenu qu’à elle, sans doute aurait-elle vécu un moment sans chauffage, mais le règlement du foyer lui imposait de faire part au plus tôt de cette défaillance. Alors elle essaie de faire de son mieux, de répondre aux questions que lui pose le réparateur, qui semble savoir y faire. Elle va chercher une bassine lorsqu’il le lui demande, puis songe ensuite brièvement à déguerpir. Mais le jeune homme se lance dans une explication, qui laisse la belle brune sceptique. Elle fronce d’ailleurs légèrement les sourcils. Non, la plomberie ne l’intéresse pas particulièrement. Et la belle brune est loin d’imaginer qu’il s’efforce en fait de faire la discussion parce que cette ambiance devenue pesante pour lui le gêne.

D’accord.

Se contente-t-elle de répondre, pas franchement à l’aise avec un sujet pareil. Il faut dire qu’elle n’y connaît pas grand-chose, si ce n’est rien, en fait, dans ce domaine. A nouveau, Max pense à s’éclipser, d’autant que le jeune homme commence les réparations, et qu’il ne semble plus avoir besoin d’elle. Mais c’est à cet instant précis qu’il reprend la parole, l’interrogeant sur le repas de Noël organisé la veille au Centre. Allez savoir si c’est son calme, ou le fait qu’il la regarde à peine, et qu’il lui tourne désormais le dos pour réparer le radiateur, mais Maxine se sent un peu moins gênée par sa présence.

C’est vrai.

Murmure-t-elle, quand il lui fait remarquer que la soirée de Noël est forcément une soirée particulière. Réalisant qu’elle n’a pas vraiment répondu à sa question, et qu’elle n’y a pas mis vraiment du sien, la jeune femme déglutit, puis décide de se faire un peu violence. Elle s’assoit sur son lit, de l’autre côté, pour ne pas le gêner, puis fixe un point dans le vide. C’est plus facile pour elle de s’exprimer de la sorte, sans le regarder, d’autant qu’il ne la regarde pas lui non plus.

C’était bien, mais un peu triste.

En même temps c’était pas la première fois que je me sentais seule au milieu d’une foule.

Lâche spontanément Max, avant de réaliser ce qu’elle vient de dire. Cette confession de sa part l’a met elle-même mal à l’aise, et la brune finit par baisser la tête, en cherchant à détourner l’attention du jeune homme de ce qu’elle vient de dire, avec une question qui concerne le fameux radiateur :

Vous avez trouvé la fuite ?

Elle n'ose pour autant pas le regarder.

Avec "D’accord." et "C’est vrai.", ça faisait trois mots ... bon allez, cinq quand on était pointilleux, c'était quand même chaud d'essayer de faire la conversation et de pouvoir compter les mots qu'on se voit répondre. Il l'avait compris dès qu'il était rentré qu'elle n'était pas bavarde mais tout de même, c'est triste.
Il eut plus de chance avec la suite - alléluia ! - alors qu'elle prenait enfin le temps de s'asseoir et qu'elle accepta de dire quelques mots de plus sur la soirée de noël qui avait été organisé par le centre, mais ce qu'elle en dit avait beau être très personnel, c'était loin d'être gai et ce n'était certainement pas une discussion qui allait la rendre plus détendue ou joyeuse...

Lui-même avait toujours été assez sociable et il n'était pas du genre à se prendre la tête pour des choses ou d'autres tant qu'elles n'étaient pas véridiques et sous son nez. Il ne se souciait pas du fait qu'il dérangeait ou non quand il s'incrustait dans une discussion et si on lui disait qu'il était de trop, bien que déçu, il haussait les épaules en s'en allait. Se sentir seul au milieu d'une foule pour lui, c'était ne pas se sentir à sa place, simplement, et dans ce cas, là il ne s'éternisait donc pas. Mais même s'il ne connaissait pas lui-même ce sentiment de déranger en tout temps, il connaissait la solitude et pensait pouvoir comprendre. Les gens n'étaient pas tous comme lui à savoir comment aborder les personnes rencontrées et il se doutait bien que ça devait être quelque chose de stressant. Mais voilà, il ne savait strictement pas quoi faire pour les aider ...

De toute façon, Maxine décida de changer de sujet en lui demandant où il en était, mais Luke était encore songeur.

Il faut tomber sur les bonnes personnes qui aident à mettre à l'aise ... Enfin ! Ouais c'est bon, j'ai localisé tout ça mais maintenant, ça risque de faire un peu de bruit, ça va nécessiter du coup de marteau ...

Maintenant que la purge était faite et que tout le reste était en place, Luke sortit son outil magique : une tuile d'ardoise taillée en pointe ! Se munissant d'un petit marteau pas très encombrant mais qui dépannait bien, il fixa la pointe de la pierre à l'endroit où se situait la fuite et laissa tomber le premier gros coup de marteau qui raisonna dans tout le système... et dans la chambre.

Luke n’est sans doute pas tombé sur la résidente la plus avenante, ou la plus bavarde, c’est vrai. Tristement vrai. Mais la réticence de Max à se rapprocher des hommes n’est pas née par hasard. Elle traîne son passé avec elle, au quotidien, et les séquelles de ce dernier lui pourrissent la vie bien malgré elle. Pourtant, l’homme en question ne l’a pas cherché, au contraire. Il s’est montré aimable, et calme, malgré sa carrure impressionnante. Pourtant, Maxine reste sur ses gardes. Elle s’assoit sur son lit, puis se surprend à répondre au jeune homme de manière plus détaillée, plus personnelle. Cette confidence la trouble elle-même, si bien que Max se dépêche rapidement de changer de sujet. Elle cherche à savoir où il en est, dans les réparations du radiateur.

Le jeune homme prend d’abord la peine de répondre à ce qu’elle lui a confié, plus tôt. Et Max se sent un peu intimidée. Elle aurait pensé qu’il aurait préféré éviter de lui répondre. Cela dit, elle n’a pas vraiment l’opportunité d’ajouter quoi que ce soit à cette conversation, puisque le réparateur enchaîne sur tout à fait autre chose. Et c’est peut-être mieux ainsi… ? La jeune femme se redresse et se crispe, en entendant le bruit qui émane des réparations. Un bruit de marteau, très désagréable, qui fait résonner toute la tuyauterie.

Inquiète qu’il fasse d’autant plus de dégâts, et qu’il empire la situation, Maxine grimace légèrement en le regardant faire. Elle se sent complètement inutile. Se mordant la lèvre inférieure, elle profite finalement du silence, entre deux coups de marteau, pour demander au jeune homme :

Je peux peut-être vous laisser seul ?

Après tout, il n’a pas besoin d’elle. Et puis sa compagnie n’est sans doute pas des plus intéressantes, de toute manière.

Effectivement, l'ardoise avait beau être un matériau magique contre les fuites et surtout super économique quand on arrivait à en avoir des petites chutes comme celle-ci gratos mais l'inconvénient, ouais, c'était le bruit. Un maillet ou un marteau et on frappe ! Ça devait paraître bourrin comme ça, mais ça tenait dix fois mieux que ces pâtes à la noix qui vendaient à prix d'or...
Luke se souvenait la première fois qu'on lui avait parlé de ça, il avait pas compris en quoi l'ardoise pouvait servir pour une fuite ... il fallait la coller ? Haha, en même temps, si on ne lui avait pas parlé un tout petit peu de chimie à se moment là, il n'aurait pas connu le pouvoir gonflant de la tuile qui bouchait alors parfaitement bien les fuites... du moment qu'on savait s'y prendre. Il en avait cassé au début, des morceaux de partout, l'ardoise c'est vachement friable quand on tape pas bien dessus.

Enfin bref, sans trop savoir ce qui la faisait fuir, le réparateur du jour entendit sa cliente lui demander si elle pouvait y aller. Effectivement, sur ce coup il avait pas besoin d'elle, et puis entre le bruit du marteau et le son qui se propageait dans la pièce, ça devait pas faire du bien à ses oreilles. Et si elle sortait pour crier au massacreur de radiateur ?! Héhé, il la laisserait crier au loup avant de lui montrer que le problème était réglé sans qu'il ait rien cassé ! M'enfin, là dessus il lui répondit :

Euuh, oui, vous êtes loin de me déranger mais je comprend que le bruit peut être emmerdant... par contre, si vous pouviez me ramener un balai ou une balayette, je risque de mettre de la poussière d'ardoise un peu partout autour... Merci. Il marqua une pause et reprit sans insister sur la partie technique comme auparavant, histoire de pas la faire fuir plus vite : Je pense que dans cinq minutes ce sera bon.

Même s'il avait la tête dans son bricolage, il n'avait pas oublié pour autant qu'elle était mal à l'aise depuis le départ, sortir un peu lui ferait surement du bien. Mais en même temps, de lui demander de lui ramener quelque chose ça permettrait de ne pas avoir à la chercher un fois le tout terminé, parce que ça allait pas s'éterniser.