Résident du Centre Personnel du Centre Autour du Centre

« La liberté est le mensonge de l'humanité … »
On me juge souvent facilement, on me dit lunatique, dépressive, pessimiste, enfin, tout ce qui fait de moi ce que je suis aujourd'hui, non ? J'ai du vivre dans une famille bien comique, oh oui, j'ai toujours été un outil pour tout le monde, dans notre appartement où la misère régnait, mes parents m'exploitaient, il fallait que je fasse tout, que je gagne de l'argent, que je les entretienne après mes années de lycée. Au fond, je comprends pourquoi plus personne ne veut de moi, on m'a tellement usée, j'ai toujours voulu rendre heureux mes parents et mes amis, mais on m'a toujours pris que pour un simple toutou que l'on promène et à qui on donne un sucre après un service rendu. Je n'étais déjà qu'une pauvre fille avant de finir à la rue, je me tuais à la tâche avec des petits jobs pour subvenir aux besoins d'une mère flemmarde et d'un père agressif et alcoolique ! Oui, je suis le genre de femme qui a un passé désastreux, le stéréotype parfait de la petite raté qu'on n'a jamais désirée, alors un jour, j'ai finis par éclater, je ne pouvais plus vivre ainsi, et je pris mes affaires pour m'en aller …

Le problème, c'est que quand on est toute seule à la rue et qu'on a faim, on se laisse aller à la vie des autres femmes qui traînent le soir sur les trottoirs, on m'a souvent demandée pourquoi je faisais ça avec le physique que j'avais, mais le physique c'était bien la seule chose que j'avais, et je n'y pouvais rien. Entre la misère de la vie familiale et celle des histoires d'un soir, je préférais encore être dans l'histoire de la jeune femme qui vagabonde entre les trottoirs pour pouvoir se nourrir et vivre, au moins, je pouvais être maître de ce que je voulais, de ma vie par ailleurs. Cependant, au bout d'un moment, avec tout ce que j'avais pu vivre, je finis par changer, cela ne m'arrangeait plus tellement et on m'avait parlée d'un foyer où l'on reprenait des personnes comme moi, n'ayant pas d'avenir et vivant au jour le jour dans les rues, sans un vrai domicile fixe. Il m'a fallu du courage pour m'y rendre, mais c'était plus fort que moi, pour une fois dans ma vie je gardais espoir d'avoir un avenir meilleur, quelque chose de plus souriant et plus adaptée pour une fleur fanée comme moi.

Aujourd'hui, j'ai rejoins le centre, je ne sais pas si je vais réussir à devenir quelqu'un, mais je sais qu'au moins mon corps ne sera plus utilisé, tout comme ma personne, au moins, dans un endroit aussi saint, je me sens bien, et je me dis qu'on me porte de l'intérêt, même si désormais je reste discrète, timide et réservée … Au niveau moral, c'est sans doute à ce niveau là que j'ai du mal à reprendre du poil de la bête, tout me fait peur, et je crains souvent mon prochain ! Je ne suis pas trop le genre de fille à se faire des amis facilement, avec mon passé, j'ai peur que l'on me juge sur ce que j'ai pu faire, et même si je l'assume en partie, j'en ai honte, dans cet endroit, je vois qu'il n'y a pas que moi qui a pu souffrir. Le Foyer me permet de m'exprimer à l'aide des thérapeutes, je n'arrive pas à oublier le passé, mais je tente de prendre sur moi, mon objectif et de devenir mannequin, ce n'est pas une chose facile, mais je m'y attache tout de même, après tout, si mon corps n'est que mon seul atout dans la vie, c'est la meilleure option qui puisse me réussir. Malgré ma grande timidité je tente d'aller vers certaine personne, mais c'est une vérité quand on dit de moi que je suis lunatique, car j'ai tendance à ne plus vouloir lâcher les personnes avec qui je m'entends bien, l'amitié est une chose que je n'ai pas vraiment connue, alors je fais toujours en sorte de préserver le peu d'amis que je peux me faire.