Aujourd'hui normalement, Logan n'aurait pas à souffrir ; Alexander ne devait pas passer au Centre. Ou du moins, il devait pas venir les voir, lui et son épaule luxée. Puisqu'il était déjà venu hier, James n'aurait en effet pas à subir une séance avec ce kiné qui s'était révélé un peu sadique sur les bords. Un rythme s'était instauré depuis la première visite d'Alex. Il était revenu le lendemain, puis tous les deux jours. Ils s'étaient donc revus quatre fois depuis leur première rencontre.

Ces quatre fois pouvaient avoir l'air insignifiantes du point de vue numérique, mais Alexander et Logan avaient développé une sorte de complicité. Un genre en tout cas. Un truc qui y ressemble quoi. Bon, l'ex-détenu ne faisait toujours pas entièrement confiance à ce gars, et ne parlait pas beaucoup de lui — le moins possible —, mais Alex avait eu l'air de quand même réussir à cerner son caractère. Et d'avoir cherché à le faire. La réciproque était aussi vraie. En effet, James s'était dit que quitte à supporter cet homme pendant quelques temps, autant apprendre à le connaître. Un peu. Et finalement, Alexander était peut-être la personne la plus proche de lui depuis que... depuis longtemps en fin de compte. Même s'ils ne se connaissaient que depuis huit jours. Enfin soit.

S'il s'était réveillé bien après que le soleil se soit levé, c'était sans doute parce qu'il savait qu'aujourd'hui, son épaule ne lui ferait pas mal outre mesure. Et il avait bien dormi. Très bien dormi. Peut-être trop d'ailleurs. Mais c'était ainsi depuis quelques jours. Le début de sa journée avait donc plutôt bien commencé. Le début seulement. Dès qu'il sortit de sa chambre, c'en était fini de sa journée calme.

Il avait pris une douche, et avait remarqué que l'éclairage de la salle de bain ne marchait plus très bien. Se séchant rapidement la cheveux, il prit en revanche son temps pour s'habiller, ayant toujours un peu de difficulté. Mais une fois son sweat noir passé, il descendit à l'accueil pour signaler le problème. Histoire que le type chargé de l'entretien, qu'il connaissait de vue — et de loin —, vienne voir de quoi il en retournait lorsqu'il reviendrait faire un tour au Centre.

La personne à qui il s'adressa nota sa chambre puis l'informa que c'était tout bon et que le problème serait bientôt réglé. Logan la remercia furtivement puis se recula pour laisser la place à un autre type. Il fit un instant face à la porte d'entrée, et débattit intérieurement pour savoir s'il sortait pour fumer. Il cala ses mains dans sa poche ventrale pour reposer son bras gauche tout en réfléchissant. Il ne faisait pas spécialement chaud dehors et puis... James n'avait pas son paquet de toute façon. Avec un discret soupir, il se détourna dans l'espoir de monter à sa chambre. Mais faisant dos à l'entrée il ne pût pas voir QUI venait d'arriver.

Voilà une semaine qu´Alexander s´occupait de Logan. Ou plutôt, il s´occupait de son épaule. Une semaine qu´il apprenait tout doucement à connaitre son patient -bien qu´il ne parlait pas beaucoup, pour ne pas dire, pas du tout, de lui. Une semaine à trouver tout doucement sa confiance. Une semaine à accentuer une complicité grandissante. Mais, cette semaine n´était pas que bonheur. Non, bien au contraire. Les thérapies étaient douloureuses pour l´un, désespérante pour l´autre. Alexander avait beau mettre en œuvre tout ce qu´il savait et tester ses connaissances, l´épaule de Logan ne faisait pas de progrès. Bon, niveau douleur, ça allait peut-être un peu mieux, mais niveau mobilité ce n´était pas franchement ça. Et ne pas voir et sentir de résultats était ce qu´il y avait de pire pour un kiné. Il passa donc une grande partie de la soirée et de la nuit à chercher une solution, qui finalement, se trouvait dans ses cours, datant de plus de 10 ans.

Ainsi, il décida de retourner au centre en cette journée, tout en sachant que, normalement, Logan avait droit à une pause aujourd´hui. Mais il se devait d´essayer cette solution ! Ce fût donc, pour cette raison bien précise, qu´il se retrouva devant l´entrée. Il devait être un peu plus de 15h lorsqu´il poussa la porte. Encore vêtu de ses habits de ville -jeans délavé, sweat-shirt à capuche bordeaux et chaussures en cuire brune - il entra dans le hall. Il hocha la tête en direction de la secrétaire en guise de bonjour et se dirigea vers les vestiaires lorsque son regard tomba sur une personne qui lui était plutôt connu. Logan. Ce cher Logan qui se baladait dans les couloirs, main gauche dans la poche ventrale de son sweater. Soupirant doucement en secouant la tête, Alexander se dirigea discrètement vers lui. Arrivé derrière lui, il lui posa une main sur l´épaule droite et le stoppa.

"Attrapé sur le fait !" dit-il d´une voix forte, son visage se parant d´un sourire en sentant Logan tressaillir avant de se tourner lui. Leur regard se croisèrent, tandis qu´Alex désigna son bras "T´apprendras donc jamais que ..." il se tu en soupirant doucement "Enfin c´pas grave, c´pas moi qui ait mal, et c´pas non plus moi qui vais devoir souffrir encore plus longtemps" Puis, apercevant le regard interrogateur de Logan, il afficha un sourire en coin et haussa les épaules "Eh bien, que dire?" Il écarta légèrement les bras "Surprise !"

Son sourire s´agrandit d´avantage avant qu´il n´éclate finalement de rire en voyant Logan palir légèrement. C´est vrai que cet homme n´avait pas eu le temps de se préparer psychologiquement à suivre une thérapie aujourd´hui. Normalement c´était sa journée de pause. Pas étonnant donc qu´il soit à tel point surprit.

Une main sur son épaule droite. Une voix forte lui disant qui avait été "attrapé sur le fait". Logan tressaillit avant de se retourner immédiatement pour tomber sur Alexander, visiblement fier de l'avoir pris par surprise. Le kiné commença une phrase au sujet du bras gauche de James, mais ne la finit pas, préférant soupirer en disant que de toute façon, ça n'était pas lui qui souffrait. L'ancien taulard n'y fit pas attention. Il ne reviendrait pas sur sa décision ; il porterait pas d'écharpe, point.

Bref. Vint ensuite la phase interrogative. A savoir : qu'est-ce que Alex faisait là. Aujourd'hui, Logan devait avoir la paix. Il avait assez souffert avec la thérapie hier, et il pensait se reposer aujourd'hui. Mais visiblement, le kiné ne paraissait pas de cet avis. Et ledit kiné dû en effet percevoir cet étonnement, car il afficha un sourire en coin et haussa les épaules.

— Eh bien, que dire ? dit-il avant d'écarter légèrement les bras. Surprise !

James se sentit perdre quelques couleurs. Il allait encore avoir mal, il le voyait venir gros comme le Golden Gate Bridge. Surtout en entendant le rire d'Alexander. Il lui glaça même le sang, rien qu'à l'idée que ce type pouvait le faire hurler comme bon lui semble. Cependant, Logan ne se laissa pas abattre et soutint le regard de ce dernier.

— Une surprise c'est censé être agréable, ronchonna-t-il.

Il n'était pas forcément mécontent de voir Alex, mais c'était surtout la suite qui le révulsait. Il n'avait pas envie de souffrir, il avait déjà donné assez cher la journée d'avant. Détaillant machinalement le kiné, il remarqua qu'il était, pour une fois, habillé normalement. Un jean, un sweat. Et bon, il fallait avouer qu'il était plutôt pas mal. Mais soit.

— Si tu viens pour m'torturer, tu peux r'partir. J'ai pas envie d'mourir aujourd'hui.

Spoiler:

Le rire d´Alexander s´accentua d´avantage lorsque Logan marmonna qu´une surprise était sensé être agréable. Pour le coup, notre jeune homme avait énormément de contre arguments concernant cette déclaration. Il avait, en tant que Kiné et en tant que personne, déjà connu énormément de mauvaises surprises. En l´occurrence, sa venue en était une, de mauvaise surprise. Mais soit. Alors qu´Alex s´apprêtait à lui exposer quelques contre argument, Logan reprit la parole, disant que si le kiné venait pour le torturer, il pourra repartir de suite. Secouant la tête, il s´avança vers Logan et lu tapota l´épaule droite.

"Non tu vois, je suis venu pour boire un café et manger un bout de gâteau" dit-il, sourire éternel sur les lèvres, avant d´abaisser le bras "enfin, plus sérieusement, depuis hier je réfléchis à une solution pour ton épaule. Au niveau de la douleur, ça va mieux, j´imagine, non?" Il attendit la confirmation de Logan avant de reprendre "mais depuis que j´ai commencé la thérapie je n´ai remarqué aucun progrès quant à la mobilité. C´est pour ça que ..."

Il enleva son sac à dos, le posa à terre et s´accroupit. L´ouvrant, il le fouilla rapidement puis en sorti un livre. Souriant, il se releva et alla se placer à côté de Logan.

"Voilà ce que j´ai retrouvé. Je suis con de pas y avoir pensée plus tôt !" Il lui montra la couverture du livre de la ´thérapie manuelle´puis l´ouvrit à la page concernant l´épaule "voilà ce que j´ai envie de tester avec toi aujourd´hui ... si tu acceptes, évidement."

Il lui donna le livre en main puis se recula et attendit une réaction de sa part de son patient.

La première phrase de Logan arracha un rire au kiné, la deuxième lui fit secouer la tête et s'approcher un peu. Il lança, toujours avec un sourire, qu'il était en fait venu pour un café et une part de gâteau. Bizarrement, James aurait préféré que ce soit la vérité. Mais Alex reprit plus sérieusement qu'il avait cherché une solution pour l'épaule de de l'ex-dealer. En effet, ce dernier avait certes moins mal qu'avant, il n'empêche que son articulation ne présentait que trop peu, voire pas du tout, d'amélioration niveau mobilité.

Puis le kinésithérapeute sortit un livre de son sac à dos, et vint se placer à côté de son patient pour lui montrer sa trouvaille. Il avait apparemment une idée de thérapie qu'il avait envie de tester dès maintenant. Il précisa cependant que c'était seulement si Logan le voulait. Le livre dans les mains celui-ci savait déjà qu'Alexander ferait tout pour essayer aujourd'hui.

James lu en diagonale deux trois trucs, et s'attarda sur quelques illustrations. Il ne pigea pas grand chose au vocabulaire de la discipline et n'essaya même pas de lire le nom des muscles et des os de plus de quatre syllabes. Il se demanda même si certains noms étaient vraiment prononçable. Bref. Son visage était plutôt impassible, mais il sentait limite son épaule gauche le rappeler à l'ordre, du genre : « tu vas souffrir ». Mais vu que c'était déjà le cas...

— Ouais bon... lâcha-t-il avec un début de grimace, je vais encore avoir mal j'sens. C'toi l'kiné de toute façon, j'espère juste que ça va marcher ton truc.

Il haussa les épaules et referma le livre, le rendant ensuite à Alex. D'un mouvement presque imperceptible, il l'invita à le suivre, mais avant de se mettre à marcher, il lui jeta un coup d'oeil, avec un léger sourire en coin.

— Le café ça s'ra pour après, deal ?

Décidément, Logan était pas mal prévisible. Bien qu’il ne le connaissait que depuis une semaine, Alexander avait pût parier une grosse parti de son argent que son patient réagisse avec étonnement et hésitation. Mais soit. Soupirant et grimaçant discrètement, Logan lui redonna le livre tout en disant que c’était Alex le kiné. Ces paroles sous-entendaient sans aucun doute que seul notre homme pouvait savoir ce qui était bon pour Logan. Reprenant son livre en main, Alexander épaula à nouveau son sac puis emboita le pas à son patient. Ce dernier reprit la parole, disant que la café sera pour plus tard. Souriant, Alexander hocha la tête.

« Si tu survis jusque là » dit-il malicieusement en lui donnant un petit coup de coude.

Bon, il taira le fait que la thérapie manuelle était, normalement, peu douloureuse. Il préférait laisser son patient croire qu’il allait souffrir, ce qui, vu la problématique présente, n’était tout de même pas à exclure. Soit.

Suivant donc Logan, ils gagnèrent rapidement sa chambre. Il attendit poliment qu’il l’ait ouverte et qu’il lui ait fait signe de rentrer, pour passer la porte en premier. Machinalement, Alexander se dirigea vers le lit et déposa son sac à côté de la table de chevet. En se redressant, son regard tomba sur une chose … étonnante. Etonnante mais intéressante. Fronçant un peu les sourcils et inclinant légèrement la tête sur le côté, il attrapa délicatement le carnet de dessin de Logan et le tourna. En reconnaissant le dessin, il écarquilla furtivement les yeux.

C’était lui. Logan l’avait dessiné, lui, Alexander Darwin Carter, dans son carnet. C’était tellement … tellement bizarre. Les traits étaient les mêmes que ceux qu’il avait aperçus dans le miroir pas plus tard qu’une heure auparavant. La même barbe, les même cheveux ébouriffés, les mêmes yeux, le même regard. C’était juste l’expression de son lui 2D qui l’irritait. Le sourire que Logan lui avait collé sur le visage était celui d’un gamin devant ses cadeaux de noël. Affichant une moue de réflexion, il fronça très légèrement les sourcils et ne remarqua que maintenant que Logan s’était approché de lui. Lançant un coup d’œil au-dessus de son épaule, il se tourna vers son patient.

« J’espère que je n’ai pas toujours cet air sur mon visage » dit-il en redonnant le carnet à son propriétaire « Ce serait difficile de me prendre au sérieux dans ces conditions »

Les mots d'Alexander n'étaient pas rassurant. Pas du tout rassurant. Aussi Logan soupira et essaya de penser à autre chose qu'à son épaule jusqu'à ce qu'ils parviennent à sa chambre. Une fois devant la porte, il sorti sa clef et ouvrit la porte, avant de laisser Alex entrer en premier. Seulement, il avait oublié un léger détail.

Ce n'est qu'en voyant son carnet à dessin dans les mains du kiné qu'il se souvint. Plus tôt dans la journée, il avait en effet dessiner un portrait dudit kiné. Il s'approcha tout en observant la réaction de celui-ci et en priant pour qu'il ne se fasse pas d'idée ou le prenne mal.

— J’espère que je n’ai pas toujours cet air sur mon visage, commença-t-il en redonnant le carnet à son propriétaire. Ce serait difficile de me prendre au sérieux dans ces conditions.

James resta un court instant silencieux, avec un sourcil relevé. Il baissa les yeux sur la page et réprima en sourire en voyant celui qu'il a dessiné. Sur son dessin, Alex avait l'air et l'expression d'un gamin. Ce qui lui allait tout à fait soit dit en passant. Et le rendait très mignon en plus mais bref, là n'est pas du tout la question. En fait, le dessin était très ressemblant. Il avait suffit à Logan de voir une ou deux fois cette expression infantile sur le visage d'Alexander pour le reproduire sur papier.

— Pourtant t'es bien comme ça, dit-il doucement, un peu perdu dans ses pensées, avant de relever les yeux sur Alex en se rendant compte de ce qu'il venait de dire. Nan, laisse tomber.

Il referma le carnet et alla le poser sur sa commode. La situation était plutôt gênante. Déjà qu'il n'était pas à l'aise lorsque quelqu'un feuilletait ses dessins — même s'il le cachait très bien —, là, c'était carrément bizarre. Il jeta un coup d’œil à Alex.

— J'préfère t'imaginer comme ça qu'avec un sourire sadique hein, tu m'pardonneras, lâcha-t-il sur un ton direct en se tournant un peu vers son vis-à-vis, avant de pousser un profond soupir. Bon, plus vite on commencera, plus vite on finira, mieux ce s'ra.

Moins de deux minutes plus tard et Logan était torse nu. Il avait, plus ou moins, pris le coup pour ne pas avoir trop mal en retirant le haut. Il souffrait toujours bien sûr. Au bout d'une grosse semaine, c'est vrai qu'il n'avait pas trop fait de progrès dans la mobilité de son épaule, mais la douleur avait heureusement diminué. Soit. Il était près à subir les techniques du kiné, en espérant qu'il ne s'amuse pas avec sa douleur.

« Pourtant t'es bien comme ça ». Bien que réfléchissant intensément au pourquoi du comment Logan lui avait dit cela, Alexander ne pût pas savoir exactement ce que son patient entendait par là. Le trouvait-il attractif, à son gout, lorsqu’il souriait d’une telle sorte ? Ou est-ce que cette phrase signifiait plutôt que, si, Alexander avait toujours cet air enfantin sur le visage ? Toutes les possibilités étaient et restaient ouvertes. Mais pour tout avouer, ce n’était pas tant pour lui déplaire. Au contraire ! Notre kinésithérapeute avait toujours été quelqu’un qui ne se prenait pas tellement au sérieux. Donc même si Logan avait fait une caricature affreuse de lui, il aurait sans doute rigolé. Soit.

Après avoir refermé et reposer le carnet et avoir signifié qu’il préférait garder un Alexander-gamin qu’un Alexander-sadique en mémoire, il enleva son haut. Souriant, amusé, notre américain observa avec un certain étonnement en quel temps record il se déshabillait. Finalement, depuis la première fois, il avait fait de sacré progrès au niveau de douleur. Quand Alexander repensait au fait que ce même homme avait eu besoin d’une bonne vingtaine de minute lors de la première consultation … . Enfin, bref.

Hochant une fois la tête, il s’avança et s’installa à la gauche de Logan. Les mains levé, près à les apposer sur son épaule, il se figea. Ce n’était pas une assez bonne place pour faire ce qu’il voulait lui faire. Se levant donc, il se plaça devant Logan.

« Bon » dit-il en posant une main sur le haut de l’épaule de son patient, attrapant l’acromion et la clavicule entre ses doigts. « C’est moi qui fait les mouvements, ok ? Ça ne devrait, normalement, pas faire mal. » Il attrapa fermement mais pas violemment, le bras de Logan, au-dessus de son coude « Tout ce que tu as à faire, toi, c’est de te détendre et d’essayer de me faire confiance, ok ? »

Cette dernière indication était sans doute la plus dure à réaliser. Mais fait est qu’une bonne thérapie n’était possible que s’il régnait une bonne confiance entre le patient et son thérapeute. Alexander ne demandait pas non plus une confiance totale et aveugle –c’était déjà beaucoup trop demandé pour quelqu’un qui avait eu une vie diront-nous « normale » et encore plus pour un ex prisonnier. Il voulait juste assez de confiance pour Logan se laisse faire, malgré la douleur.

Soit. Prenant donc le bras en main, Alexander le tira doucement et surement vers l’avant, tout en exerçant une pression graduelle vers l’arrière, sur la clavicule et l’acromion. Sous ses doigts, il senti les muscles de Logan se tendre, tandis que lui-même se raidit légèrement. Lui lançant un coup d’œil, Alexander remarqua qu’il avait les yeux fermés, tentant surement de se détendre le plus possible. Fronçant légèrement les sourcils, notre jeune homme prit la parole.

« Ça fait si mal que ça ? » demanda-t-il, sans pour autant cesser la pression sur l’épaule de son patient, l’accentuant même un peu. « Enfin, soit un homme et serre les dents »

Ce fût tout ce qu’il dit. Il pouvait ainsi paraître froid, dégueulasse et sadique, mais en tant qui kiné, si on s’arrêtait à chaque plainte de douleur de son patient, alors on n’avançait pas dans la thérapie. Et puis, les thérapies n’étaient pas toujours agréables. Ou plus précisément : les thérapies de l’épaule n’étaient JAMAIS agréables.

Ainsi donc, Alexander garda la pression constante, malgré les grognements, les gémissements et les plaintes de douleur de Logan.

Logan s'était assis sur le lit, et Alex, après s'être installé à sa gauche, préféra se relever pour se placer devant lui. Il posa sa main sur le haut de l'épaule gauche de l'ancien détenu. Ce serait lui qui ferait les mouvements, qui ne devraient pas faire trop mal. Attrapant le bras de James, il lui dit qu'il n'avait qu'à se détendre, et a lui faire confiance. Ou du moins essayer.

Plus facile à dire qu'à faire. Cependant, Logan essaya du mieux qui le pût. Il ferma les yeux en expirant doucement, et commença déjà par se détendre. Ensuite, il laissa Alex faire ce qu'il avait en tête. Encore une fois, c'était lui le thérapeute. Donc même si ça n'allait pas à James, il fallait bien qu'il s'en remette à lui. Malgré la douleur qui commençait à s'intensifier — Alex lui tirait le bras en avant tandis qu'il poussait graduellement l'épaule au niveau de la clavicule et de l'acromion vers l'arrière —, il ne réagit pas. A part peut-être un léger raidissement. Il garda les yeux clos, même lorsque le kinésithérapeute prit la parole.

Poussant un léger soupir, Logan eût envie de lui dire le fond de sa pensée. Mais ça n'était pas le moment. D'ailleurs, il serra les dents, par réflexe ; la pression devenait de plus en plus forte. Alexander continua comme ça pendant un moment. L'ancien dealer ne sut pas exactement combien de temps, mais toujours est-il que c'était trop à son goût. La douleur était à la limite du supportable. Et ses grognements, plaintes et gémissements prouvèrent par la suite que cette limite étaient dépassée. Mais bon, les thérapies n'étaient pas connues pour être toutes synonymes de relaxation, surtout celles de l'épaule.

Puis, la pression diminua. En sentant ce changement, James rouvrit doucement les yeux, soulagé. Déjà ça, c'était fait. Le kiné le relâcha doucement, avant de lui dire de s'allonger sur le dos. Espérant que la suite ne serait pas pire — parce que même s'il avait déjà souffert plus y'a quelques temps, il n'avait pas franchement envie de recommencer —, Logan s'allongea silencieusement, tandis que le thérapeute venait se placer à sa gauche. Il avait bien décidé de lui faire confiance, et il valait mieux pour Alex ne pas jouer avec cette confiance. Mais quelque chose rappela à l'ancien détenu qu'Alexander n'avait pas l'air comme tout le monde. Une intuition. Pas féminine, mais une intuition quand même.

Spoiler:

Finalement, contre toute attente et malgré la douleur, Logan se montrait plutôt coopératif. Il souffrait, mais en silence. Ce qui était une preuve indéniable qu’il était motivé pour réussir la thérapie. Accentuant encore d’avantage sa pression sur l’acromion et la clavicule, Alexander relâcha finalement lentement le bras de son patient. En même temps, il senti que ce dernier se détendis complètement. Souriant, il lui fit faire quelques mouvements et constata avec un sacré soulagement que cette thérapie manuelle faisait ses effets ! Il recommença donc à plusieurs reprises, avant de demander à Logan de s’allonger sur le dos. Changeant la position de ses mains sur le membre de son patient, Alexander tira à nouveau sur l’épaule. D’abord lentement et délicatement, puis de plus en fort. Le visage de Logan se contracta au fur et a mesure jusqu’à ce qu’un petit ‘clac’ se fît entendre dans son articulation. Là, il ouvrit subitement les yeux et se redressa, comme s’il venait d’avoir une décharge électrique. Alexander, lui, avait eu le reflex de lui lâcher le bras et de se reculer. Souriant doucement, il observa comment son patient, une main posée sur son épaule, commençait à se détendre.

« 20 minutes de tortures … » déclara notre américain après avoir lancé un coup d’œil sur sa montre « On va s’arrêter là »

Partant du principe que l’ex prisonnier était plus que d’accord, Alexander s’accroupi et fouilla à nouveau dans son sac. Il en sorti une pair de ciseaux et un rouleau de Kinesio tape. Sifflotant tranquillement, il entreprit de couper un bout de Tape avant de croiser le regard interrogateur de Logan. Souriant, il désigna la bande qu’il avait en main.

« J’vais te coller ça sur l’épaule » dit-il calmement, tout en coupant pour arrondir les bords « Si déjà tu es tellement borné pour ne pas porter l’écharpe que j’t’ai refilé –d’ailleurs, j’espère que tu l’as pas jeté comme l’autre, car j’en ai besoin- autant ne pas risquer une re-luxation, qui sera très fortement possible. » S’installant à côté de Logan, il apposa la face collante du tape sur le devant de la clavicule et sur l’omoplate. « Ça ne remplace pas un bras immobilisé, mais ça n’accentuera pas la douleur non plus et ça stabilise ton épaule de devant »

Travaillant minutieusement, il colla le reste de la bande sur la peau de Logan, frottant bien pour que ça colle bien, avant de se lever.

« Eh voilà ! » il attrapa les ciseaux et le reste du rouleau puis les remis dans son sac. Se redressant, il observant comment Logan s’était, de lui-même rhabillé et sourit doucement « je vois qu’t’as moins de problème déjà en ce qui concerne l’habillage » Il épaula son sac « Allez vient, j’t’invite pour un café et un cookie au Starbucks du coin »

La thérapie manuelle faisait son effet. Alexander continua donc un moment, constatant avec soulagement que la mobilité de l'épaule de Logan revenait peu à peu. Le kiné demanda à son patient de s'allonger sur le dos, et recommença à solliciter l’articulation. Il avant changé la position de ses mains sur celle-ci, et tira d'abord doucement, puis de plus un plus franchement. Le "clac" qui résonna dans l'épaule gauche de James le fit se redresser comme s'il avait pris le jus, sa main allant tout de suite agripper le haut de ladite épaule. Tendu comme un arc, il se relâcha finalement, surtout quand Alex — éloigné de quelques pas avec précaution —, déclara que 20 minutes de torture suffisaient.

Soupirant, l'ancien détenu laissa reposer sa main droite sur le lit, et s'appuya sur celle-ci pour poser les deux pieds à terre. Là, il observa le kiné sortir des ciseaux de son sac, ainsi que du ruban adhésif. Il regarda, interrogateur, d'abord le ruban, puis Alex, puis le ruban, puis de nouveau Alex. celui-ci lui expliqua en sourient le pourquoi du comment, tout en venant se placer à côté de lui pour lui appliquer du tape sur le devant et le derrière de l'épaule. Sur la clavicule et l'omoplate quoi. Ceci servirait à lui maintenir l'articulation en place, pour éviter une re-luxation et parce qu'il ne voulait pas garder le bras immobilisé — même si ça ne remplacait pas une écharpe.

— J'l'ai pas jeté, j'lai perdu, nuance, ne pût s'empêcher de rectifier James, avant de désigner la commode du menton. Et si tu veux récupérer ton écharpe, elle est dans un tiroir.

Une fois que le ruban adhésif fût bien fixé, Logan ne perdit pas son temps pour renfiler ses fringues. Il avait en effet beaucoup plus de facilité à passer le haut, par rapport à la semaine dernière où il avait mis une bonne dizaine de minutes pour enlever son t-shirt. Il ne faisait presque plus de faux mouvements, ce qui l'aidait grandement.

— Allez viens, j’t’invite pour un café et un cookie au Starbucks du coin, annonça Alexander en épaulant son sac.

Ajustant le bas de son sweat, James le regarda du coin de l’œil. C'était la première qu'il l'invitait quelque part, qu'ils se voyaient en dehors de ces heures de torture, juste pour sortir. Pas que cela déplaise à Logan au contraire, il était tout simplement... heureux. Un truc qui s'y apparentait en tout cas. Bref ; un sourire s'afficha sur ses lèvres.

— Ça marche, accepta-t-il avant que son sourire ne se fasse plus taquin. Mais j'veux au moins deux cookies, et un muffin.. M'ont donné faim tes attouchements.

Il jeta un regard à Alexander, puis rigola en le laissant passer dans le couloir; avant de refermer la porte derrière eux. S'engageant à ses côtés dans les escaliers, Logan fourra ses mains dans les poches de son jean et laissa son regard se balader sur les marches. Un court silence eût le temps de s'installer, le temps qu'ils descendent d'un étage, avant d'être brisé.

— Et sinon, mon dessin.. il t'a plût.. ?

Il paraissait gêné, comme un enfant qui demandait à son père s'il avait bien fait et s'il était fier de lui. Comme quoi, parler de ses dessins était toujours une source de malaise chez lui. Vu que c'était un peu son journal, là où il rangeait ses émotions et pensées. Cependant, il n'avait pu s'empêcher de demander. Logique, quand tu nous fuit.

Logan ne perdit pas son temps. Dès lors qu’Alex eu épaulé son sac et déclaré qu’il invitait son patient boire un café, Logan se leva en souriant. C’était d’ailleurs une des première fois qu’Alexander le voyais sourire. Et il est bien connu qu’un sourire était contagieux, surtout lorsqu’on s’appelait Alexander Darwin Carter. Répondant donc au sourire de son patient, il le suivit hors de sa chambre avec de rigoler doucement. Décidément, ce Logan ne perdait rien pour attendre. C’était mal de profiter de la sorte de la générosité de notre américain. Mais bon, pour tout avouer, il en avait les moyens, et ce n’était pas deux cafés, trois cookies et deux muffins qui allaient le ruiner. Se dirigeant vers l’escalier, Logan reprit que les attouchements de notre kinésithérapeute lui avaient donné faim.

Alexander se stoppa un très bref instant, quelque peu surpris par le mot utilisé. Attouchement. C’était bien la première fois qu’on utilisait ce mot pour désigner sa thérapie. Mais si Logan en pensait ainsi, n’était-il pas entrain de mettre la thérapie en parallèle avec le viol ? Un léger frisson parcouru l’échine de notre américain. Heureusement pour lui, son patient reprit la parole, changeant de sujet. Soupirant très discrètement, soulagé, Alexander s’empressa de reporter son attention sur Logan puis sourit doucement.

« Tes dessins sont excellent » répondit-il en descendant les escaliers. Restant tout d’abord dans la généralité, il reprit « Je ne m’y connais pas réellement en art, mais je sais ce qui est beau et ce qui laid à mes yeux » il lança un coup d’œil à Logan et, poussant la porte de sortie, le laissa sortir dans la rue avant de l’y rejoindre « mais pour répondre à ta question : ton dessin est excellent » il redressa légèrement le buste, prenant un air fier « Enfin faut avouer aussi que le model choisi est beau à la base, donc même une caricature de ce model sera magnifique »