Meetic-Starbucks // Mason

Revenue...comme par magie. Comme si après toutes ces années, ses prières avaient enfin été entendues. Revenue, Abigail l'était enfin...Cependant elle y avait mis des conditions et ça c'était une seconde souffrance pour Elisabeth qui n'arrivait toujours pas à comprendre pourquoi sa fille s'évertuait à vouloir la garder loin d'elle. Cependant, elle savait maintenant qu'elle était en sécurité, loin du froid glacial de l'hiver et des mauvaises rencontres.

La conseillère était plus sereine, ses nuits étaient beaucoup moins agitées et quiconque la connaissait un peu pouvait voir qu'elle n'était plus la même depuis quelque semaines. L'étincelle dans ses yeux s'était rallumée, ses traits étaient moins tirés et son sourire se montrait plus fréquemment.

Avant de rentrer dans le centre, Elisabeth décida de faire un détour par le Starbucks, l'appétit lui était même revenu. La jeune femme commanda un café latte ainsi qu'un muffin à la cerise particulièrement attirant. Une fois sa commande réglée, elle se dirigea vers la sortie, tête baissé, comptant sa monnaie.

C'est alors qu'elle percuta un homme. Toutes ses pièces tombèrent puis roulèrent au sol , allant se cacher pour la plupart dans des recoins mal dépoussiérés.

Oh excusez moi, je n'ai pas fais attention.

souffla t'elle s’apprêtant à se baisser pour ramasser son dû avant de finalement reconnaître l'homme.

Oh bonjours...Mason...

lâcha t'elle les joues rosies.

Il y a quelque temps une vieille amie commune avait décidé de les présenter l'un à l'autre, d'une manière un peu trop explicite. De ce fait, Elisabeth se sentit un peu mal à l'aise face à lui.

Mason Lamb, célibataire endurcie depuis bien longtemps, n’a pas vraiment envie d’imposer une nouvelle femme dans la vie de sa fille. Une baby-sitter, c’est une chose, une « amie » en est une autre. Il faut bien l’avouer, cette excuse arrange pas mal Mason aussi qui préfère ne pas risquer de déconvenue en amour. Qui ne tente rien, ne risque rien et dans sa vie amoureuse, c’est son leitmotiv.
Seulement certains amis ne sont pas du même avis et s’improvisent parfois cupidon pour lui. C’est le cas d’une de ses très bonnes amies qui a un jour décidé qu’il fallait qu’il se remette à sortir avec des femmes.

Voilà comment Mason a rencontré Elisabeth Altman. Le hasard veut qu’elle travaille comme conseillère d’orientation au centre Adam Hawkes. Il se souvient bien sûr de leur première rencontre, une soirée soi-disant, un rendez-vous arrangé oui, rien de plus clair. Mason s’était retrouvé bien mal à l’aise et Elisabeth aussi sans doute, ce genre de situation n’a rien de facile à gérer surtout lorsqu’on est pris par surprise. Cela dit, la compagnie d’Elisabeth n’avait pas été désagréable et Mason doit avouer qu’elle dégage un certain charme auquel il n’est pas indifférent. Mais Amelia passe en premier et puis il n’est pas sûr d’être vraiment prêt à « sortir » à nouveau contrairement à ce que pensait son amie.

Comme tous les matins, le menuisier se rend à son atelier. Situé dans le même quartier que sa maison, Mason aime Haight Ashbury, autant en couleur qu’en saveurs, c’est son enfance, son présent et sans doute son futur. Avant de commencer le travail, il s’octroie une petite halte au Starbucks. A peine entré dans le café, une femme le heurte de peu et en perd sa monnaie. Aussitôt, gentleman, Mason s’accroupie et ramasse l’argent avant de se relever. Reconnaissant aisément Elisabeth, il rougit à son tour, lui tends son argent et la salue.

« Bonjour Elisabeth, tu vas bien ? » demanda-t-il avec un large sourire.

C’est un peu banal comme entrée en matière, mais c’est au moins sincère et efficace.

Malgré son divorce, Elisabeth avait toujours eu l'espoir de se remettre un jour avec son ex mari. Même s'ils ne vivaient plus ensemble, il était fréquent que Thomas passe dans l'ancienne maison familiale et reste dormir, cependant depuis quelque mois, la conseillère sentait qu'il se détachait d'elle malgré les sentiments évidents qu'ils éprouvaient encore l'un pour l'autre. La dernière fois qu'ils s'étaient vu, Elisabeth l'avait accusé de voir quelqu'un d'autre, et il n'avait pas nié...une énième dispute s'était alors déclenché entrainant inévitablement un claquement de porte et un silence radio.

Ne voulant pas croire à l'échec de son mariage, la jeune femme ne s'était donc jamais posé la question de retrouver un homme, jusqu'à ce qu'une de ses amies mette les pieds dans le plat et lui fasse rencontrer Mason. Charmant, gentil, drôle, tout ce qu'une femme pouvait rechercher. Pour autant Elisabeth était restée distante ne se sentant pas prête à flirter, ni digne d'être de nouveau aimée par quelqu'un. Le départ d''Abigail l'avait blessé au point qu'elle avait perdu toute confiance en elle.

Lorsqu'elle le reconnu, la conseillère sentit ses joues rougir et elle remarqua que l'homme ne semblait pas non plus très à son aise. Ne voulant tout de même pas paraître grossière, elle le salua en lui offrant un petit sourire gêné.

La jeune femme se mordit la lèvre lorsque Mason lui demanda si elle allait bien. La réponse était non. Même si Abby était enfin revenue, elle refusait toujours de rentrer à la maison et Elisabeth se sentait complètement impuissant. Pour autant elle tenta de faire bonne figue et acquiesça d'un signe de tête.

Oui ça va...et toi ?

demanda t'elle un peu maladroitement tout en prenant les pièces que lui tendait son interlocuteur.

Merci, je suis vraiment maladroite !

ajouta t'elle en posant sa commande sur un table afin d'être plus libre pour ranger sa monnaie.

Pas évident d’être un papa célibataire à 38 ans, surtout quand autour de lui les amis tentent par tous les moyen de lui trouver quelqu’un. Mason ne ressent pas vraiment la solitude que n’importe quel célibataire peut avoir, il n’a pas besoin de combler l’absence de Kendall, au contraire, il préfère se protéger. Il ne l’avouera pas mais il y a bien longtemps qu’il n’a pas eu de relations « intimes » avec une femme. Il ne peut pas dire que ça lui manque, en fait il n’y pense pas. C’est peut être étrange pour un homme, mais tout a changé lorsqu’il s’est retrouvé seul avec Amelia.

S’apprêtant à acheter un café au Starbucks, Mason heurte Elisabeth qui, elle, est en train de quitter le café. Il ne peut cacher un peu de maladresse en sa présence lui aussi. Il y a longtemps qu’il n’a pas cherché à séduire une femme alors, rien que sa présence, considérant leur première rencontre, le rend nerveux. Il lui demande poliment comment elle va tout en ramassant sa monnaie au sol par pure galanterie.

Mason sourit alors qu’Elisabeth lui dit qu’elle va bien. Tant mieux alors. Il ne sait pas grand-chose à son propos. Qu’elle travaille au centre et qu’elle est divorcée, voilà tout. Ils avaient un peu parlé musique et cinéma à cette soirée mais avaient surtout échangé des banalités.

« On fait aller tu sais, la routine. » dit-il avec le sourire pour contre balancer le côté pessimiste de sa réponse. Il ne veut pas se faire plaindre, juste être honnête.

Il la regarde ranger sa monnaie tout en souriant et relève les yeux au même moment qu’elle.

« Tu vas au boulot ? » demande-t-il se sentant légèrement rougir.

« Enfin, je suppose que oui, à cette heure et … euh… enfin, laisse tomber. »

Il bafouille et se tait, conscient de la débilité de ses derniers mots. Mason passe sa main sur sa nuque pour se donner une contenance et sourit, un peu bêtement.

D’ordinaire Elisabeth se sentait à l'aise en société. Toute sa vie avait été agrémentée de brunch et de réception en tout genre, sa mère lui ayant inculqué les bases de la mondanité. Même face à des gens importants, comme par exemple le maire de la ville lorsqu'elle travaillait encore à la prison, la jeune femme avait toujours su garder la tête froide, ne se laissant pas impressionner par ses interlocuteurs. Cependant face à Mason, et malgré sa gentillesse et sa simplicité, la conseillère perdait presque ses moyens.

Joy les avait présenté comme deux célibataires qui pouvaient potentiellement se plaire, dès lors Elisabeth avait un peu de mal à se positionner. L'idée de lui plaire l'effrayait totalement et l'idée de lui déplaire la rendait mal à l'aise. La jeune femme ne s'était pas soucié de sa féminité depuis bien longtemps et être soumise au regard d'un homme lui renvoyait une image peu flatteuse d'elle même.

Je...heum..oui oui je vais au boulot...

répondit elle un peu hésitante comme si cette rencontre lui avait fait perdre le fil de ses pensées.

La scène était complètement risible et à en voir le sourire penaud de son interlocuteur, la jeune femme se sentit rassurée de constater qu'elle n'était pas la seule à être gênée. Un silence pesant s'installa alors. Elisabeth se racla la gorge et fit quelque pas en direction de la sortie.

Bon et bien...bonne journée, ravie de t'avoir revu...

souffla t'elle le sourire crispé.

La conseillère avança vers la porte puis ne sachant pas vraiment pourquoi elle fit volte face. L'estomac noué.

Mason...

appela t'elle avec spontanéité.

Lorsque l'homme se retourna vers elle, Elisabeth se sentit bête sur le moment et faillit en perdre ses mots. Elle hésita un instant puis se lança essayant d'aller de l'avant.

Je...enfin je voulais savoir si tu comptais aller à la soirée organisée par le centre pour la saint valentin ?

demanda t'elle en replaçant nerveusement une mèche rebelle.

Il est vrai que les rendez-vous arrangés mettent toujours une première distance entre les individus. C’est bête puisque c’est le dernier des effets voulus. Seulement on peut comprendre les protagonistes, c’est bien gentil de la part de leur amie commune de les avoir présentés, mais les petits sourires et les jolies remarques, tout ce qui n’aide pas à mettre à l’aise. Mason ne se sent pas encore prêt à participer à ce genre de rendez-vous d’ailleurs, mais quelque part, Elisabeth ne le laisse pas indifférent. Il se refuse pour moment à se l’avouer, mais son sourire et ses joues pourpres ne mentent pas.

Face à la situation, l’homme réagit avec maladresse. Elisabeth ne semble pas non plus très à l’aise ce qui charme même un peu le menuisier. Il lui sourit de plus belle face à l’évidence de sa réponse et comprend qu’ils ne feront que se croiser ce matin.

Après un long silence, la jolie rousse annonce son départ, Mason est un peu déçu mais il ne veut pas l’ennuyer davantage. Il sourit et s’apprête à partir de son côté aussi.

« Oui, merci, toi aussi. »

Il n’a le temps de faire que quelques pas avant d’entendre la voix d’Elisabeth l’interpeller. Il se retourne, sourire aux oreilles.

« Oui ? »

Il ne s’attend pas à grand-chose mais l’écoute avec attention. Elle lui demande s’il pense se joindre à la fête pour la soirée caritative organisée par le centre.

« Oui, oui, je pensais y aller, est-ce que tu y seras toi ? »

Question peut être un peu bête.

Ne sachant pas vraiment d'où ce courage et cette idée lui était sortie, Elisabeth se sentit rougir en affrontant le regard de son interlocuteur. C'était comme si ces quelque mots lui avaient échappés, comme si c'était son subconscient avait pris le contrôle sur elle même. Malgré la gêne, elle fût ravie de constater ce grand sourire qui s'était loger sur les lèvres de l'homme et cela lui en tira un à son tour.

A la réponse de Mason, la conseillère sentit son cœur faire un petit bond dans sa poitrine et la commissure de ses lèvres grandit encore un peu plus. Elle en était contente. Pourquoi ? Elle n'aurait sur le dire sur l'instant. Pour autant Elisabeth se sentit obligée rendre la conversation un peu moins professionnelle.

Ah c'est bien....je veux dire je suis ravie que des professionnels s'investissent dans le centre.

répondit elle son regard se faisant soudain plus fuyant de peur que ses yeux trahissent sa véritable joie à titre plus personnel.

Oui oui j'y serais ! Les résidents ont vraiment envie de s'investir, ils doivent sentir qu'ils ont du monde derrière eux pour les soutenir...

répondit elle avec conviction. A vrai dire elle avait rapidement appris à aimer ces gens lâchement abandonnés par la société toute entière.

Le silence ne manqua pas une seconde pour se réinstaller de nouveau. Elisabeth resta en face de Mason quelque instant sentant qu'une autre question lui démangeait la langue.

Je me disais que...que...

commença t'elle avant de sentir le courage l'abandonner.

Non rien...à la prochaine alors...

souffla t'elle en s’apprêtant à tourner les talons.

De mal en pis, gène et rougeurs, le spectacle doit être bien amusant pour les gens alentours. Mason ne réalise pas tout à fait ce qui est en train de se passer, mais en tout cas, il a quelques picotements dans la poitrine. Cela n’est pas désagréable d’ailleurs, il ne peut s’empêcher de sourire tout en écoutant la jolie rousse. Chaque mot semble déclencher une avalanche de sentiments et sensations étranges chez Mason. Rien à voir avec cette soirée chez Joy, ou la surprise et la présence de leur amies commune semblaient avoir créé un blocage. Mason se sent tout drôle et il n’est tellement plus habitué à ce genre de sensation qu’il n’arrive pas à en décrypter le sens.

Bien sûr qu’il ira à la soirée de la saint valentin. Mason est même heureux qu’Elisabeth pose la question et il espère l‘y trouver là-bas.

« Oui, c’est vraiment bien. » affirme-t-il souriant toujours.

Un nouveau silence apparait, Mason a du mal à fixer le regard de la conseillère. Elle commence une phrase puis s’abstient d’aller plus loin choisissant de saluer Mason avant de tourner les talons. A ce moment, le menuisier agit sans vraiment réfléchir.

« Attends. » lance-t-il avec hâte attendant à nouveau qu’Elisabeth lui donne son attention.

« Je, euh … on pourrait y aller ensemble. »

Humm, la proposition est assez tendancieuse, aussitôt, Mason a peur qu’Elisabeth le trouve trop entreprenant, lui-même se trouve trop entreprenant. Il sourit à pleine dents et tente de rester décontracté.

La solitude était pesante. Avant le drame Elisabeth avait toujours aimé les mondanités, voir du monde, rencontrer de nouvelle personne mais la fugue d'Abigail et son divorce semblait avoir brisé quelque chose en elle. Pour autant depuis quelque jours la jeune femme se sentait revivre et avec le retour de sa fille, s'était comme si elle avait de nouveau réappris à se projeter dans l'avenir. Ce fût sans doute une des raisons qui la poussa à se montrer un peu plus entreprenante avec Mason, ou du moins tenter de provoquer légèrement les choses.

Malgré tout elle n'eut pas le courage d'aller jusqu'au bout et le salua en se maudissant d'être aussi lâche. Après tout si Thomas voyait quelqu'un pourquoi s'interdirait t'elle d'aller à la soirée simplement accompagnée ? Elle avait loupé sa chance et se résigna à quitter le Starbucks.

Lorsqu'elle entendit Mason lui demander d'attendre, son rythme cardiaque s'accéléra et elle fit volte face, un immense sourire illuminant son visage.

Oui ?

lâcha t'elle le souffle court.

Oui...oui j'en serais ravie...

répondit elle avant de se mordiller la lèvres inférieure, tel une adolescente effarouchée.

Légèrement tremblante elle posa son sac sur la table prêt d'elle et en sortit un bout de papier sur lequel elle pris soin de noter l'adresse de sa maison au bord de la plage.

Tiens...voici mon adresse...Je...je serais prête pour 19h si ça te convient...

dit elle en lui tendant le papier d'une main tremblante.

Mason tremble un pue. Il s’efforce de ne pas le laisser voir tandis qu’un moment étrange s’apprête à se dérouler. C’est un peu le jeu du chat et de la souris, chacun revêtissent les deux rôles tour à tour. Elisabeth semble sur le point de faire une proposition mais finalement, c’est Mason qui la retient un instant. Il lui propose d’aller à cette fameuse soirée organisée au centre ensemble. Il n’est pas vraiment sûr de lui, mais se dit que qui ne tente rien n’a rien. La demande est d’ailleurs un peu informelle.

Alors que la rousse accepte, Mason sent ses lèvres se tirer de chaque côté de son visage. Ses yeux se plissent légèrement et ses joues rosissent.

Le petit air d’Elisabeth le fait fondre. Elle griffonne alors sur un coin de table son adresse. Mason accepte le bout de papier tout fier.

« Oui, 19 H, c’est parfait. »

Le silence un peu gênant revient. Mason ne veut pas mettre Elisabeth en retard et il s’adresse alors à elle avec une mine tout de même un peu déçue.

« Bien, alors, euh … Je veux pas te mettre en retard. On se voit à la soirée. »

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