Résident du Centre Personnel du Centre Autour du Centre

Michaela Roland est née dans une très grande famille. Une famille un peu particulière. A quelques kilomètres de Salt Lake City, dans l’Utah, dans une communauté de l’Eglise fondamentaliste de Jésus-Christ des saints des derniers jours, autrement appelée communauté mormone. Son père Henry Obson est officiellement marié à Marjorie Obson avec qui il a eu trois enfants. Ça, c’est sur le papier, pour l’administration, mais il est en réalité également marié à Nicole Roland, mère de quatre autres enfants dont Micah est la troisième, ainsi qu’à Jenna Sumpthon, sa troisième épouse à qui il a donné deux enfants. Un peu étrange, un homme, trois femmes et neuf enfants. Un peu étrange mais Michaela a été élevé par cette famille et pour elle, c’était ça la normalité. Coupée du monde, la grande famille Obson vit en harmonie avec des valeurs puritaines. Les enfants sont éduqués à la maison grâce au cours par correspondance, chacune des femmes à sa propre maison et si les autorités viennent mettre leur nez dans les affaires de la communauté, chacun sait très bien jouer la comédie.

Michaela est alors une petite fille choyée, proche de ses frères et sœurs, toujours remuante elle aime être entourée d’amis qu’elle choisit au sein des enfants de la communauté, elle aime aller au temple, cuisiner avec ses mères, rigoler avec son père. Elle grandit, tout simplement, entourée d’amour, si bien qu’elle tombe amoureuse à son tour le jour où elle rencontre le quatrième fils des Ubert, Nathaniel. Elle tombe éperdument amoureuse. Elle n’a que 15 ans mais elle aime le temps passé avec lui, son rire, son sourire et la façon dont il la rend unique. Mormon, lui aussi, ils discutent de longues soirées de leur foi et de la façon dont ils la vivent. Lorsque Nathaniel évoque son intention de prendre plusieurs femmes comme son père avant lui, Micah n’y voit pas d’inconvénient, c’est leur mission sur Terre après tout, le rôle pour plaire au seigneur. Sauf que la réalité de ses sentiments est toute autre : elle découvre la jalousie. Elle a beau y penser et y réfléchir nuit et jour, non, elle ne veut pas partager Nathaniel. C’est à ce moment qu’elle ouvre les yeux, qu’elle découvre l’envers de cette famille qu’elle trouvait si parfaite. Elle se met à voir combien sa mère est triste en réalité, combien ses frères sont durs et combien son père dirige tout d’une main tyrannique. Elle commence à se rebeller, à affirmer son avis, et tout ça fait des remous dans la famille comme dans la communauté. Régulièrement, Micah demande à son père de lui permettre d’aller au lycée de la petite ville qui jouxte leur communauté, elle le menace de s’enfuir s’il refuse. En cachette, elle quitte parfois le village pour retrouver la ville, seule, non, vraiment, quelque chose cloche dans cette vie.

Un jour, peu après avoir fêtés ses 16 ans, Michaela prend son courage à deux mains et s’enfuit en ville, elle s’adresse alors à un avocat pour demander son émancipation. Suite à cette réclamation, une enquête est ouverte, tout va très vite pour l’adolescente, montrée du doigt, érigée en traître dans la communauté, son père est finalement arrêté pour son comportement polygame et les enfants sont placés en maison. Tout s’effondre. Michaela Roland, si entourée, se retrouve seule, séparée de son environnement, dans un foyer. Est-ce vraiment ce qu’elle voulait ?

Mais d’un monde qui s’écroule un nouveau surgit. Elle découvre l’école, pas très longtemps. Bien en retard dans le programme, elle quitte finalement le lycée pour travailler dans une boutique de souvenirs dans la petite ville toute proche de la communauté mormone qu’elle a quitté. L’indépendance, elle trouve ça grisant et elle se sent fière de survivre à tout ça, même si on la trouve parfois étrange. Enchainant les petits boulots, Michaela, met de l’argent de côté pour étudier. Voilà ce qu’elle désire vraiment, apprendre, encore et toujours plus, pour ne plus jamais être aveuglée par son ignorance. Elle y parvient mais alors qu’elle arrive enfin à s’installer dans son propre studio, son père sort de prison. Il revient vers elle et cherche à la convaincre de revenir à la communauté. Poussée par l’inexplicable besoin de revoir sa famille, elle refuse pourtant, maintenant consciente de ce dans quoi elle risque de s’embourber. Ce refus sème de nouveau le trouble parmi la communauté, ils lui offrent le pardon et elle se détourne d’eux. Les jeunes adultes, ceux qui ont été ses amis, ses frères et ses sœurs commencent alors à la harceler dès qu’ils la croisent en ville. Rongée par la peur et la culpabilité, elle décide de fuir. De quitter l’Utah, d’aller où le vent la mène et ou le seigneur voudra bien la guider. Car il existe, elle en est certaine, elle pense juste que sa famille est dans l’erreur dans sa manière de vivre, et puis, une éducation ne peut pas s’oublier en quelques mois.

A 22 ans, elle prend la route. Michaela fait du stop, vivant au jour le jour, dans le Nevada, elle devient femme de ménage dans un hôtel de Reno, serveuse. En Californie, elle fait la plonge dans un restaurant mexicain, travail durement comme ouvrière agricole. Elle continue sa route jusqu’à San Francisco, un peu portée par le hasard avec pour seuls moteurs son besoin d’indépendance et sa soif d’apprendre. Elle ne renonce pas à ses rêves, vivotant, dormant dans des motels ou des chambres miteuses. A San Francisco, Michaela devient dog sitter pour une riche famille et cumul à cela un job d’employée de supermarché. Elle garde le sourire, malgré le rythme de vie épuisant et se sent récompensée lorsqu’elle peut enfin louer un studio relativement salubre. Elle s’accroche et affiche sur son frigo ce dépliant d’une université pour adulte, un endroit où elle pourra enfin s’instruire. Elle économise, mois après mois puis un jour, elle se lance, tout cet argent mis de côté, il doit être utilisé, Micah commence les cours. Mais alors qu’elle se pense assez solide, le cumul de ses jobs et les cours du soir, s’en est trop. Fatiguée, exténuée, épuisée, Micah loupe plusieurs fois son embauche au supermarché. Elle est alors renvoyée. Privée de sa source de revenues la plus importante, Michaela commence à perdre pieds. Elle veut à tout prix continuer les cours mais il faut bien qu’elle se nourrisse et elle n’a aucune autre solution en attendant de retrouver un job que de voler. Jusqu’au jour où elle se fait prendre, arrêtée pour vol, elle est relâchée rapidement sur sa bonne foi après remboursement du paquet de jambon et excuses au commerçant, mais ses patrons l’apprennent et de peur qu’elle ne les vole eux, ils décident de la remercier.

Sans ressource, tout ce qu’elle à construit disparait. Elle perd son logement et se retrouve sans abris à 27 ans. A la rue, incapable de retrouver un boulot, incapable de retrouver un logement. Micah expérimente le typique cercle vicieux. Désespérée, non, pas vraiment. Malgré tout ça, elle croit en des jours meilleurs, c’est sans doute d’ailleurs ça qui lui permet de survivre aussi longtemps. Mais dehors, la vie n’est pas la même, et elle change, elle fait la manche, ne fait plus confiance à personne, apprends à se défendre seule et évite les pièges qu’on lui tend. La drogue, l’alcool, la prostitution, sa foi toujours présente malgré tout l’aide à éviter quelques dangers. Mais elle ne peut pas être l’abri de tout. Et vit aussi des moments noirs.

Sa foi, elle est un peu floue, elle croit, mais en quoi ? C’est pourtant en entrant un jour dans un église que sa vie prend un autre tournant. Elle y rencontre le père Fitzpatrick, un vieux prêtre catholique irlandais. Avec lui elle prend le temps de se confier, de se libérer de sa culpabilité et c’est lui qui l’oriente vers le centre Adam Hawkes. Elle a 29 ans, nous sommes en décembre 2012 et Micah va enfin changer de vie.

Micah est indépendante, forte et toujours positive. Elle n’a pas les mêmes repères et peut parfois sembler étrange. Elle est croyante. Au cours de sa vie, elle n’a pas vraiment eu l’occasion de trouver ou de chercher l’amour, elle ne s’est jamais vraiment intéressée au sexe et est toujours vierge à 29 ans. Elle pleure très facilement pour de toutes petites choses mais ne lâche pas une larme face aux gros soucis. Micah ne fume pas, suce son pouce et sait se battre, elle n’a pas le permis de conduire, est fâchée avec la technologie et est très crédule.Elle n'a jamais pu couper ses cheveux les gardant comme seul souvenir de sa vie dans la communauté mormone mais elle n’aime pas qu’on l’appelle Michaela comme le faisait tout le monde là-bas. Elle peut se montrer très bavarde mais à beaucoup de difficultés à parler de son passé.